• Les zaouïas

    Algérie 1914-1918

    Les zaouïas appellent à l'enrôlement des Algériens sous le drapeau français

    Le patrimoine historique des zaouïas en Algérie n’est pas aussi luisant que l’on veuille bien nous le faire croire. Aux déclenchements des hostilités inters-européennes de la Première Guerre mondiale, ces institutions de la superstructure idéologique ont commis l’irréparable. Elles ont une lourde responsabilité génocidaire à l’encontre de milliers de jeunes paysans algériens.

    En décembre 1914, ils étaient une quinzaine de chefferies religieuses à "recommander" la défense "de la Patrie adoptive" qu’est la France, la puissance coloniale menacée par les Empires centraux (Allemagne, Autriche-Hongrie, la Turquie ottomane et la royaliste Bulgarie). L’appel à l’union sacré rejoignait les forces regrouper dans la Triple entente (la France, l’Angleterre et la Russie tsariste). A la tête de cette chefferie féodale, les deux muftis de la colonisation à savoir MM. Ben El-Mouhoub, du rite malékite et Bachtarzi Abdelkrim, du rite hanafite de Constantine, rejoints dans le même communiqué par "des notables de la ville et des personnalités les plus notables de la population".

    Les recommandations de ces seigneurs terriens portaient le titre, composé d’une partie d’un verset coranique qui avertit le fidèle de "ne pas se précipiter par soi-même dans la catastrophe".

    Le numéro de décembre 1914 de la Revue du Monde Musulman avait publié la teneur et les fac-similés de cette collaboration au génocide d'une partie du peuple algérien. Sur cette population de 4,5 millions d’âmes de déshérités, plus de 17500 seront envoyés aux enfers de France et du Moyen-Orient afin que les notables de la colonie en profitent de la Belle-époque. A l’appel des muftis, s’associeront les cheikhs de la tarîqa Tidjaniya, les sieurs Sidi Mohammed El-Kebir Ben Sidi Mohammed El-Bechir, fils du grand pôle Sidi Ahmed El-Tidjani, de Sidi Mohammed El-Bachir, de la descendance de Sidi Mohammed El-Tidjani, cheikh de la zaouïa de Temasin, qui notera que

    "Le gouvernement turc s’est placé lui-même en dehors de la religion musulmane, en accomplissant des actes répréhensibles qui tendent à la perte de l’Islam et des Musulmans".

    La tarîqa Chadlya de la zaouïa de Ksar El-Boukhari et par le biais de son chef Sidi Mansour Abderrahmane Benheikh El-Missoum considère que "l’Allemagne est en train de se noyer, et la Turquie va se noyer sûrement avec elle, car celui qui s’accroche à un noyé se noit lui aussi". De la région de Méchria, le mokkadem de la tarîqa des Darkaoua, Sidi El-Hadj Ahmed Ben El-Mekhout, estime que "les Turcs prétendent appartenir à la religion musulmane, mais ils n’ont de l’islam que le nom".

    Enfin, pour ce qui est de Sidi Daoudi Ahmed Benmohammed, chef de la zaouïa de Sidi Mansour des Beni Djennad, il sera question d’invoquer Dieu à ce qu’il extermine l’Allemagne et "ceux qui se sont placés dans sa sinistre campagne". Un pieux souhait qui sera vite exhaussé avec 26 000 Algériens morts ou disparus, sur les 80 000 appelés et les quelques 60 000 engagés dans l’armée coloniale française. Ceux qui ont refusé de faire partie de ce génocide programmé, se sont révoltés contre l’enrôlement forcé et béni par ces loges soufies, et l’exemple héroïque st venu des Beni Chougrane de la région de Mascara ou encore ceux des Aurès. La Classe 1917 a pris les armes pour repousser les militaires, les caïds et leurs sbires venus porter à la mort. De fières résistances ont eu lieu devant leurs familles qui gémissaient et récitaient la prière pour les morts, témoigne-t-on à l’époque.

    Cette brève page de l’histoire des confréries de la colonisation s’ajoute à celle du mouvement Les Jeunes Algériens du féodal Emir Khaled, dont la famille et ses alliées possédaient à l’époque des terres en Syrie et en Palestine, et dans un discours ludique appelaient tous les "civilisés" à barrer la route à la "barbarie" allemande. Pour ce qui est de celle de la France, la mouvance du dignitaire réactionnaire ne voulait rien voir les exécutions sommaires et sous forme de décimation, que des Algériens des 45e, 37e et 38e Divisions d’Infanteries subissaient sur les champs de batailles face à des armées étrangères et sur des terres qui ne sont pas les leurs.

    Il y a lieu de rappeler que tous ceux qui ont programmé leur "grande attachement la France" ont exprimé aussi leur foi religieuse de continuer à vivre "sous les plis de son glorieux drapeau" comme il a été sobrement écrit dans l’appel des muftis.

    Ne pourrait-on pas ajouter ce geste de la haute et distinguée loyauté de M. SI Kaddour Benghabrit, patron des Habous de l’islam de France, qui en 1916, sera l’émissaire de la patrie adoptive auprès du "turbulent" Hassan Ben Ali du Hedjaz (Arabie) pour apporter le soutien de Paris à sa "révolte arabe" contre les Ottomans qui ont pillé la Mecque et volé les quelques objets personnels du Prophète des musulmans. Le dignitaire algérien avait préparé le terrain à l’expédition militaire du colonel De Bremond qui entérina le partage du Moyen-Orient entre influence britannique et Française pour un jour sans lendemains, au génocide du peuple palestinien.

    Auteur
    Mohamed-Karim Assouane, universitaire

     

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