• Le développement local en péril

    Le développement local en péril - Economie


    Aucune réforme susceptible de leur donner les moyens d’exercer pleinement les missions pour lesquelles ils ont été élus, les maires qui seront issus du prochain scrutin, tout comme ceux qui les avaient précédés, auront bien des difficultés à tenir leurs promesses électorales. Le handicap est tout d’abord financier, les communes n’étant pas, comme on le sait, autorisées à lever des impôts locaux.

    Les quelques recettes tirées de la location de certains locaux, de marchés forains ou de plages, pour celles qui en disposent, ne pèsent évidemment pas lourd dans leurs budgets qui dépendent essentiellement des allocations que leur alloue le ministère de l’Intérieur par le biais du Fonds national des collectivités locales spécialement créé à cet effet au milieu des années 1970. Les allocations sont opérées de manière subjective, lésant parfois les unes et privilégiant les autres.

    Très peu de communes parviennent à faire face aux dépenses autres que celles des salaires de leurs fonctionnaires. Elles se retrouvent bloquées dès qu’elles se trouvent dans l’obligation d’engager des dépenses induites par des événements imprévus (sinistres, réparation urgente d’un ouvrage collectif, organisation d’un événement culturel ou autres, etc.). Toutes les réformes visant à huiler les rouages de la gestion des communes sont restées lettre morte et les élus locaux condamnés de ce fait à n’être que de simples figurants, de surcroît empêtrés dans des difficultés quasi quotidiennes créées par leurs tuteurs directs que sont les walis et les chefs de daïra, qui sont en réalité les véritables dirigeants des communes.

    Mais si la modicité des disponibilités financières a de tout temps tiré la gestion et le développement économique des communes vers le bas, le coup fatal leur a en réalité été donné, par la dissolution des entreprises publiques locales (EPL) qui leur servaient de moyens de réalisation et d’intervention qu’elles pouvaient immédiatement mobiliser sans souci de disponibilités financières. Grâce à ces entreprises de proximité, les communes ont pu construire des écoles, des centres de santé, des centres culturels et de loisirs, ouvrir des routes, intervenir d’urgence en cas d’intempéries, ce qu’elles ne peuvent plus se permettre aujourd’hui. Faute d’entreprises communales, les maires sont contraints de proposer leurs projets aux Programmes communaux de développement (PCD), d’attendre qu’ils soient officiellement retenus et financés, d’engager une consultation pour choisir l’entreprise (généralement privée), de passer dans des conditions très bureaucratiques un marché et d’attendre sans pouvoirs réels de surveillance, la réalisation du projet.
    L’apport des entreprises communales

    La dissolution des entreprises publiques locales sur injonction du FMI au milieu des années 90 a été, comme on peut bien le comprendre, vécu comme un véritable séisme par les Assemblées populaires communales, qui se sont retrouvées du jour au lendemain sans entreprises de proximité grâce auxquelles elles pouvaient régler d’épineux problèmes locaux. Leur fermeture, suivie d’un rapide bradage de leurs actifs, a, de surcroît, entraîné la mise au chômage de milliers de travailleurs auxquels les communes devaient assurer gratuitement un minimum d’assistance.

    A cette période, environ 1400 entreprises publiques locales (EPL) sur les 1700 qui opéraient à travers le pays avaient fait l’objet de dissolution, détruisant du coup pas moins de 200 000 postes de travail, notamment dans les communes les plus déshéritées, où elles étaient les seules et uniques pourvoyeuses d’emplois. Avec elles, disparaissaient également de précieux moyens de réalisation pour de nombreuses communes enclavées et pauvres pour lesquelles ces entreprises de proximité constituaient de véritables bouées de sauvetage, notamment lorsque surviennent des calamités naturelles. Ces entreprises dissoutes en raison de leur déstructuration financière ont laissé dans un total désarroi les communes qui ne trouvaient subitement plus d’outils de réalisation pour concrétiser leurs programmes de développement et soulager quelque peu le chômage qui les affectait.

    Environ 300 entreprises publiques locales ont tout de même pu être sauvées de cette vague de dissolutions, grâce à une mesure gouvernementale, consistant à accorder à ces entités un statut d’entreprise publique économique (EPE) ouvrant droit à des traitements économiques et financiers (assainissement financier et recapitalisation) à même de leur éviter la faillite. Il faut en effet savoir que les capitaux des EPL sont constitués par le fonds des collectivités locales du ministère de l’Intérieur, alors que ceux des EPE appartiennent au Trésor public, donc à l’Etat. Deux modes de gestion tout à fait différents leurs étaient appliqués. La difficulté a été définitivement résolue par la constitution d’un fonds unique (le Trésor) pour les deux.

    Les 300 entreprises publiques locales qui avaient échappé in extremis à la dissolution ont ainsi pu poursuivre leurs activités et, pour certaines, se développer de manière très satisfaisante.  Si la dissolution des entreprises publiques locales pouvait se justifier par la déstructuration irrémédiable de leurs comptes, ce qui ne l’est par contre pas, c’est l’interdiction encore aujourd’hui faite aux élus locaux de créer de nouvelles entités (EPL, groupements inter-communaux d’entreprises, etc.) en mesure de prendre le relais de celles qu’on avait fait disparaître. L’occasion est pourtant encore propice à ce genre d’initiatives.

    Les milliers d’actifs (terrains et immeubles notamment) laissés par les EPL dissoutes, peuvent en effet servir à capitaliser les entreprises à créer et les banques pourraient également y contribuer, pour peu qu’elles aient le droit de regard sur leurs business plans et sur le choix des dirigeants. Des centaines de milliers d’emplois pourraient être ainsi créés à travers le pays, notamment en faveur des jeunes des localités les plus rongées par le chômage. Les communes enclavées pourraient également s’offrir une ou plusieurs petites entreprises de réalisation ou de services (transport public) dont les populations locales pourraient tirer d’inestimables bénéfices.

    La création d’entreprises publiques locales ne devrait évidemment pas se faire au détriment des sociétés privées, auxquelles l’égalité d’accès aux marchés publics doit être garantie. Une application stricte du code des marchés publics qui organise la concurrence et assure la transparence des compétitions, est de nature à garantir cette égalité de traitement. Il pourrait par ailleurs être sérieusement envisagé, et la législation algérienne le permet aujourd’hui, d’associer le privé au capital des entreprises publiques locales et réciproquement. Si elle venait à se concrétiser, la coopération entre les entreprises des deux secteurs ne pourrait, à l’évidence, qu’être bénéfique à ces maillons faibles dont l’incapacité d’agir explique en grande partie l’état de délabrement avancé dans lequel se trouve l’écrasante majorité de nos collectivités locales.

    Source :El watan.com

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