Tahya El Djazaïr, c’est tout ce que j’ai envie de dire», déclarait à la volée Mohamed Gharbi, joint hier par téléphone, seulement quelques minutes après sa libération, alors qu’il était en route en direction d’Alger. Une voix sereine et pleine d’émotion, avec laquelle il n’a cessé de répéter son amour inconditionnel pour sa patrie en deux mots : «Tahya El Djazaïr !» Le moudjahid Mohamed Gharbi a été libéré dans l’après-midi d’hier après dix années de prison et une attente de 4 mois avant de recevoir cet avis favorable à la demande de libération conditionnelle, déposée le 6 février dernier par son avocat. L’information a provoqué une onde de choc parmi ceux qui militent depuis des mois, voire des années pour cette cause. Sa famille, transportée par l’émotion, n’a pu faire que de brèves déclarations pour exprimer un soulagement qu’ils disent «indicible». Son fils Yazid, qui a été la première personne à apprendre sa libération, expliquait, hier, alors qu’il était déjà en route vers la capitale en compagnie de son père : «Cette libération a soulagé toutes nos angoisses».

«Nous sommes tellement heureux de l’avoir près de nous après dix années de souffrance ; j’avoue qu’en me réveillant ce matin, j’ai eu un très bon pressentiment. J’ai été alerté et dès que je suis arrivé à la prison de Khenchela, je l’ai trouvé. Il m’attendait», ajoute-t-il, enthousiaste et déconcerté à la fois. Les jeunes du collectif Libérez Mohamed Gharbi (LMG), qui ont assidûment milité pour sa libération ces derniers mois, n’ont pas manqué d’exprimer, eux aussi, leur apaisement. «Nous sommes tellement heureux d’arriver à ce dénouement qui répare une terrible injustice que l’Algérie a failli faire subir à l’un de ses plus valeureux patriotes. On est tellement fiers et contents de tous ceux qui ont mené le combat avec nous, qui ont cru sincèrement en cette cause», confiait hier Khaled, l’un des initiateurs de LMG, d’une voix étouffée par l’émotion. Autour de lui, la liesse des jeunes du collectif se faisait entendre alors que la préparation pour l’accueil dans la soirée du patriote battait son plein.

De son côté, maître Boutamine, avocat de Mohamed Gharbi, a tenu à préciser sa joie particulière de voir son client libéré justement le jour de la fête de l’indépendance. «Le 5 Juillet est une date hautement symbolique pour cet homme qui, malgré son âge avancé, n’a jamais hésité à prendre les armes pour défendre la République», explique-t-il. Et d’ajouter : «Ce n’est que justice. L’Algérie vient de payer sa dette envers cet authentique moudjahid». Samir, un autre initiateur de LMG, a bien insisté, lui aussi, sur la particularité de cette date de libération : «C’est un 5 Juillet assez exceptionnel, Mohamed Gharbi a retrouvé sa liberté, c’est une belle victoire pour l’Algérie et toutes les générations à venir.» Mohamed Gharbi, moudjahid, également connu pour sa lutte contre le terrorisme en tant que chef de Groupe de légitime défense (GLD) dans la région de Souk Ahras, a été condamné pour avoir tué le 11 février 2001 Ali Merad, terroriste amnistié à la faveur de la concorde civile qui le menaçait de mort.

Après s’être tout de suite rendu à la police, le moudjahid – aujourd’hui âgé de 75 ans – a été condamné à 20 ans de réclusion lors d’un premier procès tenu en 2004 et, 5 ans après, deux autres jugements en appel aboutissent à sa condamnation à mort.
En décembre 2010, après une très forte mobilisation menée par le collectif LMG, le moudjahid a bénéficié d’une grâce présidentielle qui a commué sa peine à 20 ans de prison, ce qui lui a donné le droit de constituer un dossier de demande de libération conditionnelle.
Ayant purgé la moitié de sa peine, dix ans de réclusion, sa libération est enfin survenue alors qu’une très forte polémique enflait autour de sa condamnation.