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    Une marée humaine a répondu, à Montréal, au premier ministre québécois, Jean Charest. Quatre jours après l'adoption d'une loi censée briser un mouvement de protestation contre une hausse de frais de scolarité dans l'enseignement supérieur, le cortège s'est déplacé, mardi 22 mai, du quartier des spectacles à celui des affaires, sur de grandes artères, provoquant des bouchons à la sortie des bureaux.
    Couleur dominante: le rouge, en petits carrés de tissu épinglés sur un vêtement, en turbans, nez de clown ou banderoles, car il est devenu le symbole de cette lutte.
    La manifestation "illégale" s'est déroulée dans le calme, au son des tambours, trompettes et casseroles. Déguisé en clown policier, avec nez rouge et bouclier en carton, un manifestant brandissait son "arme": un vaporisateur d'eau portant l'inscription "terroriste".
    Sur les pancartes, on pouvait lire ce détournement d'une chanson de Gilles Vigneault: "Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est la répression..." ou une phrase prononcée par François Mitterrand en mai 1968 : "Si la jeunesse n'a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort!"
    Au centième jour de la grève contre l'augmentation en cinq ans de 75 % des droits de scolarité à l'université, cette manifestation (la deuxième en importance sur les 230 organisées dont 29 nocturnes, y compris au soir du 22 mai) a pris des allures de combat contre l'autoritarisme et le néolibéralisme incarnés, selon certains, par M. Charest.
    Adoptée le 18 mai, la loi suspend en effet jusqu'en août les sessions dans les collèges et universités touchés par la grève et limite le droit de manifester en imposant des amendes faramineuses aux contrevenants, individus et associations. Ce dispositif d'exception a fait l'effet d'une douche froide sur les étudiants. Il a été vivement condamné par des formations politiques et des responsables sociaux, syndicats en tête, qui y ont vu une atteinte aux droits fondamentaux, comme le droit de grève et de manifestation.
    "100 JOURS DE GRÈVE, 100 JOURS DE MÉPRIS"

    C'est donc pour dénoncer cette loi que des dizaines de milliers d'étudiants et adultes de tous âges, dont des professeurs, des artistes et des syndicalistes, ont pris d'assaut le centre-ville de Montréal, répondant à l'appel à manifester sur le thème "100 jours de grève, 100 jours de mépris".
    Signe supplémentaire de la transformation du conflit étudiant en conflit social et politique, nombreux étaient ceux qui critiquaient sévèrement le gouvernement libéral. Sylvie Bessette, étudiante en design de l'environnement à Montréal, en donnait la mesure: "J'en ai ras-le-bol d'un système démocratique qui fout le camp." L'un reprochait à M.Charest de "criminaliser le mouvement étudiant"; une autre qu'"il n'a pas choisi le peuple, mais le pouvoir".
    Une affiche clamait : "J'étudie pour traduire, pas pour être traduite en justice." A la tribune, Céline Hequet, étudiante en sociologie et membre de la Classe, organisation étudiante la plus radicale, était claire : "On ne se bat plus contre les droits de scolarité, mais contre le néolibéralisme et la répression. Nous refusons que notre liberté s'arrête là où celle du marché commence", résumait-elle.
    Comme en écho, la foule scandera plus tard "Charest dehors. On t'a trouvé une job dans le Nord", référence au projet de développement économique du Plan Nord, cher au premier ministre.
    SECOND SOUFFLE
    Avec cette loi spéciale, M.Charest avait fait un pari : casser le mouvement. Il ne semble pas en voie de le gagner. Le plus long conflit étudiant du Canada a plutôt trouvé un second souffle. Mardi, le premier ministre s'est dit "déçu" que des citoyens ne respectent pas la loi en participant à une manifestation "illégale".
    Le porte-parole de la Classe, Gabriel Nadeau-Dubois, avait de fait invité à un "geste collectif de désobéissance civile" face à une loi "absurde et inapplicable". La veille, le groupe avait demandé à des volontaires de s'inscrire, avec leur photo, pour des interpellations virtuelles sur le site www.arretezmoiquelquun.com. Plus de 3 000 personnes avaient déjà répondu à l'appel mardi !
    Gouvernement et associations étudiantes s'accusent mutuellement d'être inflexibles. "On déplore que le gouvernement Charest ait choisi la voie de la répression plutôt que celle de la négociation", déclarait mardi l'un des dirigeants étudiants, Léo Bureau-Blouin. "La loi ne fonctionne pas dans son application", estimait Martine Desjardins, présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec, une autre association étudiante.
    Selon un sondage du Journal de Montréal de mardi, la population québécoise serait à 51 % d'accord avec la hausse des droits, alors qu'elle juge à 53 % la loi d'exception "beaucoup trop sévère" et à 73 % qu'elle ne contribuera pas à ramener le calme. Une majorité souhaite une reprise du dialogue. L'appel peut-il être encore entendu ?

    LE MONDE | 24.05.2012 à 15h19 • Mis à jour le 24.05.2012 à 15h19 Par Anne Pélouas (Montréal, Canada, correspondance)

    Note perso :Le combat des étudiants est juste et Santodji le soutient . Le Québec peut etre fier de sa jeunesse ! Charest dégage !

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